Principe d'entente

Au fond du jardin, près du mur dont les moellons brunissent au soleil de cette fin d'été, un pommier buissonneux. Sous l'espalier déformé se devine encore une taille en palmette. Celle-ci, abandonnée depuis une trentaine d'années, laisse désormais à l'arbre le loisir de hisser vers la lumière ses membres chenus. Ils donnent parfois, de plus en plus rarement, un fruit coriace, acide et piquant dont nous nous persuadons de l'inimitable saveur.

Le premier conquistador fut une clématite effrontément plantée à moins d'un mètre de l'ancêtre. Ses pétioles audacieux eurent tôt fait de se poser sur le tronc, et de grimper en en frôlant presque les branches, l'air de ne pas y toucher, jusqu'à l'étage supérieur, au-delà duquel l'absence de prise les fait parcourir le chemin inverse, jusqu'à ce que l'automne interrompe ce discours amoureux. Se sont-ils au moins parlé.

Le témoin immédiat est une vigne dont le pied, pourtant distant de plus de deux mètres,  a profité d'une installation improvisée : trois fils de fer horizontaux espacés de cinquante centimètres, tendus entre l'arbre lui-même et le contrefort du mur le plus proche. Cette treille incertaine plait aux sarments, leurs vrilles ont elles aussi rapidement atteint les sommets, et les fruits sont heureux.

Je suis toujours frappé de voir à quel point, avec une économie réelle de taille et de soins, une attention précise mais légère, tout ce monde s'entend bien, sans hégémonie particulière. On pourrait presque penser que cette cordialité est naturelle. Alors souvent je viens m'asseoir ici face à eux, dos au soleil mais éclairé en réflexion, et je pense à autre chose.

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