Textures, 2
Textures 1, textures 2 : de Senlis à Pourville
un échange de textes
Hélène Verdier / Dominique Autrou
Text(ur)es : matière, temps, mémoire en fils croisés
Vases communicants avril 2015
Rembobiner le jour. Un pas après l’autre, mer tenue à l’œil, pensée qui divague, cheveu sous le vent. Il y a sur les digues dans ces allers-retours comme une obligation. Promenade aux anglais, promenade Marcel Proust, côte d’Azur ou d’Opale, parfums d’autrefois.
Dans la station reconstruite aux couleurs des fifties, rose, turquoise, jaune poussin, la couche des nuages dressait un voile d’impalpables vapeurs — lumière écornée par l’ombre de la lune, couleurs salies — a-t-il dit par la suite. Pourtant dans le flou d’un univers trop gris, éclataient les rouges et bleus du jour pour tromper l’illusion.
Sur le terrain de jeux les enfants étaient ailleurs, confinés sous les stores, interdits d’un plein air qui vient brûler les yeux sous ce soleil absent. Les toboggans tournaient à vide, ondes et courbes en tranchées de métal. Je m’approchai, me souvenant des planches d’escalade, couleurs passées des prises, yeux de chouette veilleuses, méduses du Bosphore sur le plan incliné, imaginées l’été dernier.
Je retrouvai après l’hiver le contreplaqué marine, son bestiaire créé par l’usure du temps et les chaussures d’enfant. Les couches se croisaient, broderies de bois dessinant en passées les fils entrecroisés des brodeuses de fleurs — antependium pendu au devant de l’autel, temps suspendu. Roses, pivoines, chardons de fils d’argent en lamelles frisées, soies mauves, roses, bleues entrecroisées, applications de perles de verre, travaux interminables que l’on ne peut compter. Il fallait soupeser, mesurer du regard les textures du temps.
Je me souvins des moires en gros-de-Tours, soies épaisses écrasées de pesantes calandres. Je me souvins de cet acharnement à produire le beau, si beau — images en symétries de mat et de brillance autour d’une pliure — que seule la moire blanche pouvait langer les morts accompagnant les dernières visions des visages aux yeux clos dans les cercueils refermés.
Hélène Verdier — simultanées
Pourville, entre éclipse et marée d'équinoxe, 19 mars 2015
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le tiers livre et scriptopolis sont à l'origine du projet des Vases communicants le premier vendredi du mois. Écrire chez l'autre...
Angèle Casanova liste les échanges de texte ici (à la suite de Brigitte Célérier), avant d'en faire la recension dans le même blog. Merci à eux.
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La moire en miroir...
RépondreSupprimerInscription sur une photo : à voir aussi ailleurs.
la moire dessine des papillons comme un Rorschach
RépondreSupprimermerci Dominique A. , pour l'accueil et surtout pour ce long travail de réflexion (particulièrement adapté au sujet), projection, échanges...
RépondreSupprimerBelle démarche en effet, plaisir de ce travail
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