Un dimanche, ou peut-être un lundi ou un mardi, va savoir



Il n'avait pas plu depuis de longues semaines. La rivière Marne, endormie sous ses saules, semblait ne plus vouloir nous régaler de son lit en désordre. Et puis les bourrasques du dernier weekend ont eu raison de sa somnolence, la voici enfin libre et répandue comme on l'aime.


En contrepartie, impossible d'emprunter le chemin de halage complètement inondé. On ira donc s'amuser ailleurs. Au cinéma, tiens, ce serait une bonne idée. Celui de Chelles porte un joli nom chantant comme un slogan néo-soviétique, l'« Étoile Cosmos ». 
Ici, c'est la belle vue dont on jouit depuis le trottoir qui le jouxte quand on regarde vers le midi, là où les richesses s'accumulent puis, brutalement, manquent. Loin au bout, la Méditerranée comme un mur.


Le film s'appelle « Demain », c'est un documentaire soutenu aux exemples heureux dont il ressort entre autres, s'il en était besoin, la toxicité des régimes politiques du monde occidental perclus de collusions avec les multinationales, et la nécessité d'en sortir sous peine de mort (résumé brutal, mais résumé).

Quoi qu'il en soit, cet air léger et libre en sortant, comme un émoi d'avant. 

La fin du monde est reportée à deux ou trois décennies, ce qui donne le temps de voir.






Par exemple, avant la tombée du jour on peut aller en discuter entre nous (« entre potes », expression étrangement désuète remplaçant avantageusement pour une heure ou deux le « entre camarades », autrefois plein d'espoirs) au parc de Rentilly qui jouxte l'autoroute A 104 ou « Francilienne », sorte de ruban dépotoir bordé de bidonvilles par où transitent les camions qui gavent l'économie européenne.


Sur la route, un passage devant le collège de Saint-Thibault-des-Vignes nous rappelle la courte et méconnue période cubiste du peintre.



Dans le parc, un iceberg terrestre, sorte de galerie des glaces retournée comme un trappeur le ferait d'une peau, objet chu de quelque désastre, comme dit l'autre.



Mais avant de partir il est bon d'entourer de nos voix le séquoia dont aucun cartel n'indique l'âge, étant simplement précisé que sa circonférence atteint les huit mètres. Il est important d'embrasser son écorce souple comme une sphaigne, on pourrait presque y laisser son empreinte (tiens, à propos... bientôt le 15).

On pourrait aussi rester y palabrer, alors son houppier absorberait les mots plus hauts que les autres.



...


Commentaires

  1. Belle enfilade d'images (le gamin qui traverse imprudemment comme la liberté le lui recommande)...

    Le cousin de "L'Etoile Cosmos" se trouve rue de Rennes, à Paris (spécialisé bien entendu dans le cinéma soviétique) : salle à l'ancienne où l'on projeta quand même "L'adieu au langage" de Godard en 3 D !

    La Marne : ne jamais la faire trop marner puisque cela ne la fait par marrer (trop belle).

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